Place forte du football européen depuis 2016, Madrid s'apprête à remettre le trophée de la Ligue des champions à Tottenham ou Liverpool samedi (23h00). Une finale 100% anglaise dans une capitale espagnole en fête et en alerte, face aux milliers de supporters présents.
Au stade Metropolitano de l'Atlético, la "coupe aux grandes oreilles" va changer de terre d'accueil pour rejoindre l'Angleterre, après trois saisons de mainmise du Real Madrid de Zinédine Zidane et cinq années consécutives de monopole espagnol.
"From Madrid to the sky", titrait samedi en anglais le plus lu des quotidiens espagnols, Marca, évoquant la "Champions la plus folle de l'histoire".
En début d'après-midi, des supporters des deux clubs déambulaient en chantant dans le centre de Madrid, buvaient de la bière aux terrasses par 29 degrés ou exhibaient désespérément des pancartes "buy tickets" ("j'achète des entrées").
Kemam Kalkavar, ingénieur de 50 ans originaire de Turquie et fervent supporter de Liverpool, avait pris spécialement l'avion depuis Ankara avec des amis, et se disait prêt à payer 5.000 euros pour une entrée, car "regarder le match à l'intérieur du stade c'est bien plus passionnant".
Mettant en garde contre la revente de faux tickets, un porte-parole de la police a indiqué à l'AFP qu'une Vénézuélienne avait été arrêtée vendredi sur la Puerta del Sol, pour avoir vendu à un citoyen roumain deux fausses entrées, à 4.200 euros chacune.
Opulente Premier League
Sur le terrain, qui prendra le pouvoir ? Liverpool, quintuple champion d'Europe, battu en finale l'an dernier par le Real (3-1) et entraîné par le charismatique technicien allemand Jürgen Klopp ? Ou bien l'étonnant Tottenham de l'Argentin Mauricio Pochettino, un club qui vit sa première finale de C1 et brigue un premier sacre ?
Dans un Metropolitano bouillant et assourdissant, l'habituelle intensité physique de la Premier League promet du grand spectacle entre les "Reds" de l'Egyptien Mohamed Salah et les "Spurs" de l'Anglais Harry Kane, incertain avant la rencontre. Quant à la ferveur des chants anglais, elle risque de donner la chair de poule... à condition de supporter la canicule sévissant à Madrid, où la température doit atteindre samedi au moins 33 degrés.
"C'est un match fantastique à jouer et à savourer, même si la meilleure manière de l'apprécier est de gagner", a prévenu le gardien français Hugo Lloris, capitaine de Tottenham.
Quel que soit le vainqueur, voilà la Liga espagnole contrainte de rendre sa couronne européenne à l'opulente Premier League, en phase ascendante malgré l'interminable feuilleton politique du Brexit.
La force de frappe financière est l'une des raisons de la montée en puissance anglaise, mais pas uniquement: il faut aussi prendre en compte l'apport de techniciens étrangers réputés comme Klopp et Pochettino, qui ont amené "leur nouveauté, leur savoir-faire", de l'avis de Zinédine Zidane, et fait éclore de nombreux jeunes talents.
Un constat partagé par Klopp lui-même: "Nous avons deux vraies équipes dans cette finale. Je respecte énormément ce que +Poch+ a accompli. Il avait un groupe très talentueux à son arrivée, mais la manière dont ils ont progressé est vraiment impressionnante", a dit vendredi l'entraîneur des "Reds".
Son homologue des "Spurs" lui a rendu la politesse: "Liverpool est une grande équipe. Avec Manchester City, c'est la meilleure équipe d'Angleterre. Ils étaient déjà en finale l'an dernier et tout le mérite en revient à Jürgen et à ses joueurs", a répondu Pochettino.
Les deux clubs, comme d'ailleurs leurs entraîneurs, ont une opportunité idéale de se défaire de leur étiquette de perdants magnifiques. "Je ne me vois pas comme un +loser+!", a lancé vendredi Klopp... qui a perdu les trois finales européennes qu'il a vécues comme entraîneur.
Dispositif de sécurité inédit
Au total, quelque 32.000 supporteurs anglais doivent prendre place au stade Metropolitano, d'une capacité de 68.000 spectateurs.
Mais "on prévoit que 70.000 supporters anglais vont passer le week-end ici avec nous", a dit à la télévision régionale Juan José Blardony, directeur de l'association des hôteliers madrilènes "La Viña", estimant par ailleurs qu'"un million de litres de bière" serait consommé.
Même si Tottenham et Liverpool n'entretiennent pas de rivalité historique, les autorités espagnoles ont déployé un dispositif de sécurité inédit avec 4.700 agents et pour la première fois un drone pour surveiller les supporters.
"Pour une compétition sportive, ce sera probablement le plus grand déploiement que nous ayons fait pour garantir la sécurité", a avancé le directeur général de la police espagnole, Francisco Pardo Piqueras.
Dans la nuit de vendredi à samedi, la police nationale a déjà annoncé que quatre citoyens britanniques avaient été arrêtés pour différentes agressions.