Club historique mais longtemps mal aimé du championnat d'Angleterre, Leeds retrouve la Premier League après seize ans de purgatoire, avec Marcelo Bielsa à sa tête et un jeu aux antipodes du "Dirty Leeds" des années 1960/70.
Bielsa et Leeds, sur le papier, c'était le mariage de la carpe et du lapin: une union contre-nature vouée à l'échec.
Imaginer l'incandescent Argentin dans le froid et humide Yorkshire, l'apôtre d'un football total dans un club réputé il y a quelques décennies pour son jeu rugueux et resté l'un des plus détestés d'Angleterre, faisait même presque rire.
"Je ne sais pas ce que les gens pensaient de Leeds avant mon arrivée et je ne sais pas ce qu'ils en pensent maintenant", a-t-il assuré jeudi lors d'une conférence de presse.
Il lui suffirait pourtant de regarder les fresques murales qui fleurissent à son effigie dans l'ancienne cité industrielle, dont une où il est représenté les bras en croix, en Christ rédempteur.
Car l'histoire entre Bielsa et Leeds est aussi celle d'une la rencontre entre un homme et un club presque au fond du trou.
Après sa démission surprise au soir de la première journée de la saison 2015/2016 à Marseille, Bielsa n'avait fait qu'un passage de 48 heures à la Lazio Rome à l'été 2016, et de quelques mois à Lille la saison suivante.
"Le Pirlo du Yorshire" -
Il a dû attendre un an et demi avant que Leeds, qui venait de terminer à une anonyme treizième place en Championship, se tourne vers lui.
Les Peacocks, trois fois champions d'Angleterre (1969, 1974, 1992), vainqueurs de la coupe de l'UEFA (1973) et finalistes deux ans plus tard de la Coupe d'Europe des clubs champions, se traînaient depuis quatorze ans entre le Championship (D2) et la League One (D3), minés par des scandales financiers et un instabilité chronique en coulisses.
Bielsa était, à son arrivée, leur onzième entraîneur en six ans.
Le succès a été pourtant été immédiat. Leeds a frôlé la montée il y a deux saisons, avant de l'obtenir cet été avec le titre de champion de D2 en prime.
"Je ne partage pas l'opinion selon laquelle j'ai changé les structures de l'équipe. Quand je suis arrivé, le club avait les structures nécessaires pour être compétitif à un bon niveau", a-t-il assuré modestement.
Son équipe développe pourtant un jeu estampillé 100% Bielsa: intensité, risque, pressing, jeu de possession.
Et avec Kalvin Phillips, surnommé "le Pirlo du Yorkshire" et récemment sélectionné pour la première fois en équipe nationale à 24 ans sans avoir joué un match dans l'élite, Bielsa a trouvé le cœur de son équipe, capable de dicter patiemment les attaques pour créer des décalages grâce aux latéraux qui s'écartent au maximum.
Liverpool en guise de hors-d'oeuvre
Son style de management et son style dans la vie ont aussi conquis ces gens du nord qui aiment sa simplicité: les photos de lui dans des cafés ou en train de faire ses courses pullulent sur les réseaux sociaux et il a quitté la luxueuse suite qu'il occupait dans un hôtel pour un appartement au-dessus d'une confiserie.
A 65 ans, Bielsa sait pourtant que le plus dur reste à faire car les exemples d'équipes au jeu séduisant en Championship mais qui ont connu une saison pénible en Premier League sont nombreux, à commencer par Norwich, bon dernier avec 14 points de retard sur le maintien la saison passée.
L'équipe s'est tout de même renforcée qualitativement avec les arrivées, entre autres, de l'attaquant international espagnol Rodrigo Moreno, pour un montant record pour le club de 35 M de livres (39 M EUR) bonus compris selon la presse, et de l'international allemand Robin Koch au milieu.
"L'une des difficultés auxquelles nous aurons à faire face cette saison, c'est de continuer à jouer comme on le veut", a admis l'Argentin, dont le baptême du feu samedi aura lieu à Anfield Road devant le champion sortant Liverpool.
"Il ont mérité leur titre de champion, c'est sans conteste l'une des meilleures équipes au monde", a reconnu le coach, qui n'est pourtant pas plus intimidé que ça, parce que, pandémie de Covid-19 oblige, "Anfield n'est pas vraiment Anfield quand il n'est pas plein".