Yannick Lincoln en sélection, c’est fini. Véritable icône de la petite reine locale, le coureur a pris sa retraite internationale contre sa volonté. Une décision qui fait suite à ce qu’il considère comme un chantage fait par JeanPhilippe Lagane, président de la Fédération mauricienne de cyclisme.
Les championnats d’Afrique sur route, programmés du 8 au 13 février à Accra, au Ghana, ont été le sujet de discorde entre Yannick Lincoln et le président de la fédération. Appelé pour faire partie de la sélection élite masculine, le cycliste a finalement décliné l’offre en raison de ses obligations familiales et professionnelles, dit-il.
« J’étais prêt à transmettre mon expérience au bénéfice de la sélection. Malheureusement, comme mon épouse Aurélie a également été retenue, je devais trouver une personne pour s’occuper de mes deux filles. D’habitude, ce sont mes beaux-parents qui le font, mais ils ne sont pas au pays. À l’heure de finaliser la sélection, je n’avais pas encore trouvé de solution. Ainsi, j’ai décliné l’invitation de l’entraîneur national, Trevor Court », explique-t-il.
Entre-temps, le président de la FMC, JeanPhilippe Lagane avait pris les taureaux par les cornes en proposant un « deal » à Yannick Lincoln. « Il m’a fait comprendre qu’il n’y a aucun budget pour le VTT cette saison et qu’un seul coureur masculin en l’occurrence, Alexandre Mayer allait participer aux championnats d’Afrique. Alors, il m’a proposé de trouver un moyen financier pour que je puisse être au départ du rendez-vous continental de VTT à condition que j’accepte la sélection pour les championnats d’Afrique sur route. C’est du chantage », indique le coureur.
Toutefois, c’est en apprenant le refus de Yannick Lincoln que les discussions auraient pris une autre tournure. « Le président m’a dit à travers un message vocal sur WhatsApp que je ne ferai plus jamais partie des sélections à l’avenir. De plus, il a ajouté qu’il allait faire couper ma bourse du High-Level. J’ai compris qu’on ne voulait plus de moi. J’ai donc décidé de prendre ma retraite internationale. Ce n’est certainement pas la fin dont je rêvais, mais je suis fatigué de me battre. J’ai passé l’âge », souligne le sextuple vainqueur du Tour de Maurice.
" Ce n’est pas du chantage "
Et d’ajouter : « Je ne pensais pas à arrêter d’aussitôt. Je suis toujours motivé. Je voulais être compétitif malgré mes 40 ans. Cependant, j’ai des priorités qui sont ma famille et mon travail. Je voulais me battre pour une qualification pour les Jeux olympiques de Paris 2024, même si je suis réaliste que cela allait être compliqué. J’espérais également changer la couleur de la médaille aux Jeux africains après avoir décroché l’argent au Marathon en 2019 ».
Contacté pour une déclaration concernant ses propos à Yannick Lincoln, Jean-Philippe Lagane confie qu’il a effectivement tenté de « négocier » avec le coureur. « Ce n’est pas du chantage. C’était plus pour le motiver, car je sais comment il est. Il existe des négociations entre athlètes et dirigeants, mais pour cette sélection, ce n’était pas négociable. J’ai compris qu’il n’est plus intéressé. Certes, j’ai demandé au ministère de mettre sa bourse ‘on hold’ en attendant qu’il fasse un choix concernant la sélection, mais je ne pensais pas que cela allait le pousser à prendre sa retraite internationale », confie le président de la FMC.
Yannick Lincoln a défendu le quadricolore depuis plus d’une vingtaine d’années. C’est en 1996 qu’il connaît sa première sélection chez les cadets pour le Grand Prix Safran à l’île de la Réunion. Il connaîtra ensuite une ascension vertigineuse avec plusieurs titres de champion de Maurice. Il compte également plusieurs médailles dont cinq en or aux Jeux des îles de l’océan indien, un sacre aux championnats d’Afrique de VTT en 2016 au Lesotho et une qualification aux Jeux olympiques 2016 à Rio, au Brésil, qu’il n’a pu prendre part en raison d’une blessure. Il est aujourd’hui le directeur du High Performance Centre du Complexe sportif de Côte d’Or. Désormais, c’est une page de l’histoire du cyclisme mauricien qui se tourne. Cependant, comme l’a dit Yannick Lincoln : « Je n’arrête pas ma passion pour autant… ».